Berlin, l’autre pays du fromage

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Berlin collectionne les clichés, comme tout lieu chargé d’histoire. Il en est un qui se vérifie à chaque coin de rue, ou plutôt dans chaque parcelle de spot festif, c’est celui de la présence de jeunes frenchies se la collant plus ou moins. C’est le « nomadisme festif » souligné par la pétition Quand La Nuit Meurt En Sielnce et dont souffre cette bonne ville de Paris, qui n’a pas d’offre délirante pour les zozos hédonistes du week end. Les court séjours ici sont centrés autour du patrimoine et de l’art de vivre (le vin, le fromage, la bouffe, euh la gastronomie « à la fraaaaançaise »!).

Berlin collectionne bars, guinguettes « am Spree » (en bord de Spree, la rivière qui se subdivise en canaux dans la ville), parcs, « biergarten » et clubs bien évidemment. La ville a un maillage d’endroits nocturnes qui la rend incontournable sur l’échiquier européen de la scotchitude (Berghain, Watergate, Maria, Tresor, Golden Gate…), mais c’est plutôt une ambiance générale qui la distingue. Ces guinguettes en bord de l’eau, comme le Bar25 et le Club der Visionäre, les bars en général (mention spéciale à Madame Claude), ces épiceries de quartier (l’équivalent de nos fameux « rebeus ») où l’on chope des bières à 0,70 € que le vendeur vous dégoupille avec plaisir (ce n’est pas encore un réflexe parisien) sont, principalement, des invitations à passer du temps en extérieur et profiter de l’espace à plusieurs. Il n’y a pas la même quiétude d’un temps ralenti à Paris. La temporalité n’est pas la même. On est pressés et entassés à Paris, ville qui rigole sous cape de l’échec du clubbing business tel qu’on l’entend à Londres, Ibiza, Lisbonne, Miami ou même Shanghai. Cependant, selon un responsable de la Sacem Ile de France, les clubs parisiens se portent bien (c’est un autre débat, mais il faut le noter).

Le mythe du clubbing pas cher est battu en brèche, les droits d’entrée et les consommations sont moins chères qu’à Paris, la bière avoisine les 3€, mais les cocktails avoisinent les 7-8 €, et sans oublier les entrées de club qui dépassent les 10 € quand ceux ci offrent des plateaux de qualité. Il n’y a que le CDV (Visionäre) qui majore ses consommations d’un € pour les artistes. Mention spéciale pour ce lieu qui m’a permis d’écouter Mathew Dear acoudé au comptoir qui fait face à la DJ booth. Donc, l’expatrié français n’ayant que son RMI pour subsister ne sortira pas très longtemps. Le clubber français cru 2010, qui pense « sortir plus pour travailler moins », ne connaîtra pas d’extase prolongée, même si l’accessoire de fête local, le speed, est abordable (10 € le gramme selon des sources bien informées).

Les francos-berlinois se trouvent de plus en plus de l’autre côté du comptoir. Les artistes ont été nombreux à y vivre il y a quelques années, comme Miss Kittin et Agoria, mais ne sont pas restés, au contraire des artistes techno et house américains des années 80 et 90 qui se sont installé (Richie Hawtin) ou qui sont restés plusieurs années (Jeff Mills, Blake Baxter). Quelques lieux berlinois sont exploités par des expatriés, comme le HBC, Jacki Terrasse – Maria, qui peuvent décrire à leurs compatriotes les avantages et handicaps d’être exploitants, promoteurs ou limonadiers Outre-Rhin. Les contraintes administratives et règlementaires sont moindres qu’en France, les autorités sont volontaristes, les retombées touristiques sont trop importantes désormais, même si la flambée immobilière pénalise grandement l’accession des allemands peu aisés à se loger (phénomène que le Sud Ouest et la Normandie ont connu avec les anglais). Comme la concurrence est rude entre les établissements et que les artistes « tête d’affiche » voient leurs cachets s’envoler de manière proportionnée à la chute de leurs ventes de disque, l’équilibre économique n’est pas simple, et il n’y a pas fort à parier que les prix augmentent logiquement.

Les clubs berlinois font eux aussi une opération de promotion commune, comme Nuits Capitales à Paris. Samedi 11 septembre a lieu Berlin Clubnacht.

Quid du Berlin alternatif ? La pauvre « Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée » peut désormais aller gambader dans les rues rénovées de Kreuzberg ou de Prenzlauer Berg ou faire du shopping dans les boutiques tendances de la Rosa Luxembourg StraBe (un comble pour l’héroïne spartakiste…), Berlin devient la capitale de l’Allemagne réunifiée et d’un pays locomotive économique de la zone Euro. Berlin se boboïse, les immeubles croûlants qui jouxtaient des squats ou des bars ou clubs sont remplis d’habitants pétitionnant contre le bruit. Remarquez, ils ne font pas la grève de la faim, comme les riverains de la Mécanique Ondulatoire (CP_mecanique-ondulatoire), encore autre affaire à suivre.

Cadeau de Xanaé & Nicolas, interview du physio du Berghain.